Cachez ce zombie que je ne saurais voir…
C’est peu dire que l’interdiction par la ville de Lille du « Zombie Walk » initialement prévu ce week-end à Lille m’a vraiment surpris. J’avais d’abord bien du mal à imaginer les débordements éventuels qui auraient pu avoir lieu dans un rassemblement qui est de manière évidente bon enfant, familial et participatif. J’ai été d’ailleurs assez étonné de la désinvolture avec lesquels sont traités les 5000 participants, excusez du peu, qui devaient initialement en faire partie. Mais ce qui est encore plus étonnant, c’est la raison invoquée pour cette interdiction, la « mauvaise image » qu’ils donneraient de la ville. On croit franchement halluciner. Qui pourrait croire un seul instant que quelqu’un irait penser « Non, je n’irai pas en week-end à Lille, j’ai vu qu’ils avaient fait un Zombie Walk »…? Je me suis même demandé à un moment si on n’allait pas interdire aux enfants lillois de se déguiser en sorcières et sorciers et de sonner aux portes pour demander des bonbons pour Halloween !
Un décalage sociétal et générationnel
Derrière ce ram-dam médiatique, de quoi s’agit-il en fait ? Tout simplement et très clairement d’un décalage sociétal et générationnel des responsables politiques, qui apparaît sous ces 2 interdictions. La « culture zombie », qu’on le veuille ou non, est un fait réel et massif. Les films de zombie sont légion et font recette. La série Walking Dead, sous forme de comics et en série TV, bat record sur record. C’est bien évidemment une sous-composante de ce qu’on pourrait appeler une « culture geek », à base de science fiction, de jeux vidéos, de Star Wars, de bien d’autres choses encore, le tout agrémenté de mauvais goût et d’humour potache. Sur cette base de culture partagée par les ados, les jeunes adultes, les trentenaires et les quadras, un zombie walk n’est finalement qu’un rassemblement convivial et festif, où l’on exprime ensemble sa passion pour un univers alternatif, transgressif et finalement bien sage, sans doute bien plus qu’une Fête de la Musique ou qu’une nuit de Braderie…
A Roubaix, toutes les cultures sont les bienvenues
Mais encore faut-il pour cela partager ces codes, considérer que la culture geek existe , et ne pas s’intéresser qu’à une prétendue « vraie culture », celle qu’on peut mettre en exposition au Tri Postal ou dans une création de l’Opéra de Lille.
Alors je le dis haut et fort : à Roubaix, toutes les cultures sont les bienvenues, même la culture zombie ! Depuis plus de 20 ans, Roubaix s’attache certes à accueillir et soutenir des propositions culturelles d’excellence, mais aussi et surtout (c’est bien ce qui fait la spécificité du projet culturel roubaisien) à veiller à ce que les acteurs culturels de la ville « parlent » aux roubaisiens, par le biais d’ateliers, de visites, de projets participatifs, d’actions culturelles, de festivals des habitants, et bien d’autres initiatives encore.
Pour ce faire, tout ce qui « fait culture » pour les roubaisiens fait culture pour la ville aussi. La « culture zombie » et par extension la « culture geek » sont bien évidemment des objets culturels tout à fait dignes d’être considérés. Est-elle de mauvais goût, outrancière, agressive, politiquement incorrecte..? Oui, bien évidemment, et je dirais presque tant mieux ! L’art officiel, consensuel et lisse n’a jamais été très intéressant. Et puis quelle belle affaire, Jan Fabre fait bien pire sur la scène de l’Opéra de Lille (voir mon post de blog à ce sujet), simulacres de viols à répétition jusqu’à la nausée, et miction en direct sur scène, mais comme il est dans les codes d’une culture reconnue et officielle, ça ne pose de problèmes à personne.
Les zombies et tous ceux qui veulent affirmer leur attachement à ce mouvement culturel sont donc les bienvenus à Roubaix; je rêve personnellement de voir 5000 zombies descendre l’avenue Jean-Baptiste Lebas le 31 octobre 2015, chiche..?