C’était il y a 10 jours, pour le dernier jour du festival « Les petits pas », le festival de danse contemporaine pour le jeune public qu’organise depuis 10 ans maintenant le Gymnase.

photo Magali Chojnicki Mattana
Le spectacle « Frontières » était une des plus belles propositions de ce festival, et présentait le résultat de la collaboration d’une classe de CM2 de Roubaix, à l’Ecole Michelet, avec le chorégraphe belge Pol Coussement, qui menait aussi un travail en parallèle avec des élèves belges à Courtrai. La pièce était superbe et rendait fier du travail accompli en si peu de temps.
C’était déjà beaucoup; mais après les applaudissements, le jeune Oussama s’est levé, a pris son courage a 2 mains et a lu le texte suivant au public nombreux du Gymnase :

Standing ovation… photo Magali Chojnicki Mattana
» Merci !
On voulait tous vous remercier d’être là aujourd’hui, d’être présents pour notre projet. On remercie tout le monde. Mais on voudrait remercier plus particulièrement Pol [NDA : Coussement, le chorégraphe] et Passerelle [NDA : le programme transfrontalier dans lequel s’inscrivait ce spectacle].
Ce n’est pas notre maîtresse qui nous a dit de t’écrire, on en avait envie, elle nous a aidés à trouver des mots pour nos sensations et nos émotions. On a tous écrit un mot pour toi et ensemble on les a réunis et ça donne cette petite lettre que je te lis de la part de nous tous.
Pol,
Merci d’être venu jusqu’en France à Roubaix pour le projet, pour nous, pour notre classe. Le projet Frontières c’est pour nous plus qu’un projet de danse. C’est notre projet.
Au début, on était plusieurs et moi aussi à dire que la danse c’était nul, et on dit bien c’était car maintenant on a changé. La danse maintenant c’est super. C’est difficile mais c’est super.
Oui, on a changé d’avis car pendant ces 2 mois, on a franchi pleins de frontières et la première c’est celle des a priori. On avait pleins d’avis sur tout et sur tout le monde et on a découvert qu’on se trompait.
Dans la classe, on est devenu soudé, une équipe, avec ce projet on avait besoin d’être ensemble et maintenant on a tous compris ce que ça veut dire d’être ensemble. On a aussi franchi des frontières terrestres, on est venu en Belgique, on s’est émerveillé des différences, et maintenant on est plus tolérant et d’ailleurs on a appris ce mot.
On a découvert le monde de la danse grâce aux spectacles qu’on a vus et on sait avoir un avis un peu…sur ce que l’on voit.
On a franchi donc des nombreuses frontières: l’amitié, oser, danser, s’exprimer, essayer, se tromper mais on a franchi avec toi et notre maîtresse des frontières de courage et d’émotions !!!!
On est sorti de notre carapace et on s’est dévoilé, ce spectacle c’est nous beaucoup de nous, un peu de toi, un peu de la maîtresse mais c’est NOUS. Pendant ce projet on nous a donné de l’importance.
Aujourd’hui, le projet s’arrête, on ne te verra plus tous les mardis mais en réalité pour nous tout commence, une nouvelle vie car on a grandi.
Dans notre cœur et notre tête le projet a trouvé sa place, une place à tout jamais.
Pol, tu l’auras compris tu vas nous manquer mais on sait qu’on va se revoir car le projet avec les correspondants n’est pas terminé.
Et on espère peut-être pouvoir à nouveau montrer notre projet à toute l’école ……et à ceux qui n’ont pas pu venir aujourd’hui !
Les élèves de CM2 de Magalie Chojnicki-Mattana; Aïcha, Amine, Oussama, Sofiane, Zahra, Halya, Elias, Doniazed, Maxime, Walid, David, Mongia, Marco, Lina, Hajar, Karima, Abdellah, Elias, Chahine, Nasrine, Halim, Yasmine, Camélia, Donovan. ».
Autant vous dire qu’à la suite de cette lecture les gorges étaient serrées et les yeux humides, sur scène comme dans la salle, et aussi pour la « maîtresse » Magali Mattana :)!

après le spectacle…
Je recommande donc vivement à ceux qui considèrent qu’on dépense trop pour la culture à Roubaix et au Gymnase ou en danse contemporaine en particulier de se remémorer ces mots des élèves… : « pendant ces 2 mois, on a franchi pleins de frontières et la première c’est celle des a priori »; ou encore « Pendant ce projet on nous a donné de l’importance »; ou bien encore « avec ce projet on avait besoin d’être ensemble et maintenant on a tous compris ce que ça veut dire d’être ensemble »
Je n’ai pour ma part pas trouvé meilleure expression de la nécessité d’avoir une politique culturelle dans notre ville, ni meilleure motivation pour continuer à la développer…