D’habitude je t’aime bien les Inrocks, d’ailleurs je te lis depuis tellement longtemps, mais là t’es venu à Roubaix, t’as fait un article et t’as pas assuré du tout.
D’abord, dis à ta journaliste Inès Bouchareb que le premier devoir du journaliste, c’est de vérifier les faits. Et là, tout ce que tu racontes, c’est truffé d’erreurs et d’inexactitudes. Ça fait pas sérieux pour la suite. 300 structures dans le tissu associatif local ? Il y en a déjà 400 sur le portail associatif de la ville, sans compter toutes celles qui n’y sont pas référencées. Le tabac du Pile graffé dans le cadre de l’expo Street Art de la Condition Publique ? Non, elle commence à la fin du mois, c’était l’an dernier avec la Maison du Projet. Un projet « Blanchemaille consacré à la rénovation des quartiers insalubres » ? Euh pas vraiment, il s’agit d’accueillir des start-up dans les espaces libérés par La Redoute. La manne de la rénovation urbaine pour Blanchemaille ? Pas un centime de l’ANRU, c’est un programme MEL et EPF. Pierre Dubois « ancien élu de 75 ans » ? Aux dernières nouvelles, il est toujours élu. Bref, en 4 pages, ça commence mal niveau crédibilité.

La « boutique abandonnée » du Pile a aussi été le support d’une oeuvre d’Aurélien Nadaud l’été dernier pour Pile au rdv…
Après, j’aurais aussi aimé que tu sortes des clichés ressassés sur Roubaix qu’on croirait plutôt sortis de Valeurs Actuelles. On enchaîne en quelques pages la « ville la plus pauvre de France » (entre guillemets, mais de qui ?), les « briques de misère », des « structures urbaines quasi insalubres » (ça veut dire quoi ?), la « grisaille du ciel » (original!), un FN « qui aurait dû rafler la mairie depuis longtemps » (toutes les villes pauvres votent FN partout en France, c’est ça ?), un « environnement peu accueillant » (ah bon ?), une ville qui est une « ancienne ville dortoir » (sérieux ?), etc. Ça a l’air d’être dur pour toi de sortir de ton 11ème arrondissement et de te renseigner sur l’histoire et l’architecture d’une ville industrielle, qui se trouve aussi être labellisée Ville d’Art et d’Histoire, depuis plus de 15 ans, avec plus de 40 sites inscrits à l’inventaire des Monuments Historiques, mais c’est un détail qui a dû t’échapper.
Bon, si l’on fait abstraction des inexactitudes et d’un biais franchement négatif, j’aurais aussi aimé te dire que sur le fond, je ne suis franchement mais franchement pas d’accord avec toi. Tu parles des jeunes qui ne se retrouvent pas à la Condition Publique, moi je t’aurais parlé de Pile au Rendez-vous, un festival co-construit avec les habitants, qui a attiré plus de 5000 personnes en juin dernier. Pas mal pour une « forteresse […] même pas au quartier ». Tu parles des jeunes talents de la région dont les rappeurs pour qui on ne fait rien, je t’aurais parlé du Festival #XU avec sa grand place noire de monde autour des animations danse et musique de Brahim Bouchelaghem, des ateliers de l’ARA, des salles de répétition du Bar Live, des événements de Da-Mas, du weekend hip hop de So Street, de cette belle expo Street Generation(s) de la Condition Publique qui va aussi – et surtout – investir le quartier du Pile et en faire un musée à ciel ouvert…
Et puis , si tu avais cherché à me joindre, je t’aurais aussi parlé de Camerone Bida, ce jeune danseur du cru, repéré à Shake shake shake, et finalement intégré à Auguri, la dernière création du directeur du Ballet du Nord, Olivier Dubois. Je t’aurais parlé des Fil aux Records, ce collectif de jeunes musiciens qui ont accompagné ce beau projet étudiant et littéraire de « Roubaix en 150 mots » qui a enthousiasmé la ville. Je t’aurais parlé de ces 15 enfants des Quartiers Nord qui vont intégrer l’orchestre Démos de la Métropole Européenne de Lille et jouer du hautbois et de la flûte 2 fois par semaine avec des intervenants de l’Orchestre National de Lille au Centre Social de l’Alma. Je t’aurais parlé de Toi Président, où les jeunes des quartiers vont être formés et rémunérés pour prendre la parole via des vidéos Youtube sur les Présidentielles…
Finalement, je crois que ça aurait donné un bien meilleur article, et là on aurait vraiment compris pourquoi « ma cité va pas craquer », au lieu du misérabilisme condescendant, plein d’erreurs et de clichés que tu nous as asséné. Sans rancune, la prochaine fois on s’appelle avant ?