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Pour un Lille3000 plus ouvert, plus ambitieux, plus efficace

C’est la semaine du bilan pour l’édition « Renaissance » de Lille3000, qui s’est déroulée de septembre 2015 à janvier 2016. Après une présentation aux élus de la MEL ce mercredi, un point presse ce vendredi détaillera les chiffres et les leçons de cette édition.

les totems brésiliens de la Rambla de Renaissance

les totems brésiliens de la Rambla de Renaissance

Disons-le avec flair play, ou tout simplement avec honnêteté : cette édition est pour ma part un succès. La fréquentation, si elle est en retrait sur l’édition 2012, reste néanmoins tout à fait honorable au vu du contexte plus que délicat des terribles attentats du mois de novembre. De manière plus profonde, le talent d’assembleur de Lille3000, pour faire travailler ensemble des dizaines de villes de la MEL, est remarquable; et la forme participative de nombreuses manifestations (la parade d’ouverture et les Conservatoires ou écoles de musique, les opérations jardin de St So, les cafés Renaissance, le Mumo…) une vraie réussite voire une source d’inspiration pour un élu à la culture comme moi. Citons aussi certaines initiatives innovantes, comme le fablab des makers de la Maison Folie de Moulins, particulièrement inspirantes.

dans l'antre des makers...

dans l’antre des makers…

Pour autant, Lille3000 cède comme souvent à son goût de la gonflette : à additionner les fréquentations de toutes les manifestations culturelles de la métropole, la somme totale annoncée est finalement bien virtuelle; et on a du mal à croire que la Villa Cavrois, la fête des Allumoirs à Tourcoing ou la Nuit des Arts à Roubaix aurait accueilli moins de visiteurs sans Lille3000. Mais ils sont labellisés dans le programme, donc on additionne…Ne serait-il pas plus honnête de ne parler que des manifestations « pures » Lille3000, à St Sauveur et au Tri Postal ?

De la même manière, Didier Fusillier souligne dans la presse le coût pour lui modeste de la manifestation (8 M€) par rapport au Festival d’Avignon (14 M€) ou à la Biennale de Lyon (21 M€ d’après lui). A y regarder de plus près, la comparaison n’est pas si simple, entre une manifestation qui a lieu tous les 3 ans d’un côté, tous les 2 ans pour Lyon, et pour des coûts bien moindres si l’on consulte d’autres sources (8 M€ pour l’édition 2015 de la Biennale de Lyon, soit pile poil le coût de Liille3000…). Quant au Festival d’Avignon, j’avoue ne pas trop comprendre ce qu’il y a de similaire entre un « simple » festival de théâtre et 4 mois d’événements culturels dans 77 communes.

Didier Fusillier, conseiller artistique de Lille3000

Didier Fusillier, conseiller artistique de Lille3000

Quant à l’impact économique qui est parfois invoqué, c’est à vrai dire le grand flou. L’étude commandée est plutôt axée sur le qualitatif, avec à vrai dire d’excellents résultats; mais la commande n’était pas celle d’une évaluation des retombées économiques; et même une donnée simple comme l’évolution des nuitées sur la période n’est pas encore disponible. On laissera donc chacun gloser sur le sujet, sans vrai chiffres sur lesquels se baser. Ennuyeux.

Pour ma part, j’estime qu’une manifestation culturelle d’envergure est indispensable à la notoriété et au rayonnement de la métropole lilloise; et que Lille3000 a acquis en 11 ans et 5 éditions un savoir faire et une crédibilité irremplaçables. La forme est convaincante; la qualité des manifestations proposées est forte; et drivée par son conseiller artistique multicartes, elle arrive à surfer sur l’air du temps culturel avec un réel brio.

Pour autant, il est légitime de se poser certaines questions. La première est celle de la nécessaire évolution de la forme. Ne risque-t-on pas une certaine lassitude si la 6ème édition à venir nous propose aussi une parade d’ouverture, une rambla rue Faidherbe, des expos best of à St So et au TriPo, la labellisation de tout le reste…? Il pourrait être temps de faire bouger au moins un des paramètres. On aimerait aussi que des mouvements émergents soient mis encore plus en avant; je pense en particulier aux arts numériques et au gaming.

L'expo Séoul vite vite au Tri Postal

L’expo Séoul vite vite au Tri Postal

De la même manière, ma qualité d’élu roubaisien me force à souligner le lillocentrisme patent de la manifestation. Certes, la ville de Lille est le plus gros financeur de l’opération, soyons francs, et c’est légitime que les opérations y soient très concentrées. Mais la MEL est aussi partie prenante; et pourtant au global c’est moins de 2% du budget de l’événement qui est consacré à Roubaix, 2ème ville du territoire. La disproportion paraît énorme, surtout quand on voit comment Lille3000 met en avant dans sa communication et ses bilans des expositions ou des événements qu’elle n’a que très marginalement financées.

(le nouveau festival #XU de cultures urbaines à Roubaix a été soutenu par Lille3000)

Ce qui nous mène aussi à nous interroger sur la pertinence du territoire concerné. De la même manière que le Voyage à Nantes a évolué en Estuaire sur toutes les villes du long de la Loire, ne serait-il pas temps que Lille3000 rayonne sur tout ou partie de la région NPDCP, comme Xavier Bertrand le proposait dans son programme (« une réussite comme Lille 3000 doit être un événement à rayonnement large qui profite à toute la Région ») ? Evidemment, il ne faudrait pas que la dilution fasse perdre de l’intensité, mais il y a sans doute des pistes à creuser.

Enfin, il faudrait aussi parler sans tabou du coût, de l’efficacité de l’événement par rapport à ses semblables, de l’impact économique; bref avoir des données fiables et sans biais méthodologiques, ce qui n’est pas pour l’instant disponible du moins à ma connaissance.

Je serai bien sûr, comme je l’ai été pour cette édition, en tant qu’élu de Roubaix et conseiller métropolitain, disponible pour accompagner la réflexion des équipes de Lille3000, de la MEL et de la Région dans cette voie.

Journal d’un élu en état d’urgence – Jour 4

La matinée du 4ème jour commencerait presque innocemment, pour un élu à la culture, par l’Assemblée Générale de Lille3000. Mais Ivan Renar, le président de l’association, pape et vieux routier de la vie culturelle du Nord Pas de Calais, démarre bien sûr la réunion par une minute de silence en mémoire des victimes des attentats, et y associe aussi les salariés de Lille3000, qui partagent le bureau en open space à Euralille. Pendant ce moment de recueillement et de retour sur soi-même, il me vient à l’esprit que ce n’est sans doute d’un début, et qu’il y aura encore bien d’autres minutes de silence…

Ivan Renar

Ivan Renar

Didier Fusillier, dorénavant conseiller artistique de Lille3000, note dans son intervention que, malgré un certain nombre d’annulations de spectacles pendant le week-end, ceux qui ont été maintenus ou les expositions qui sont restées ouvertes n’ont pas connu de baisse de fréquentation, et se félicite que les métropolitains et les touristes aient gardé l’envie de sortir. C’est effectivement ce qu’on a constaté le week-end précédent au Musée La Piscine.

Didier Fusillier, directeur de la Maison des Arts de Créteil, pose dans son établissement. Créteil le 15/03/2012 Photo François Bouchon / Le Figaro

Didier Fusillier, directeur de la Maison des Arts de Créteil, pose dans son établissement.
Créteil le 15/03/2012
Photo François Bouchon / Le Figaro

Le soir, j’avais prévu de longue date d’assister à la représentation de Nelson, la pièce portée par Chantal Ladesou, au Colisée. Au vu des circonstances, il paraît indispensable de prendre la parole avec la représentation, et c’est tout naturellement que je propose à Guillaume Delbar, le Maire de Roubaix, de le faire. Il accepte bien volontiers, et nous voilà à 20h30 devant 1800 personnes, salle comble.

Les balcons du Colisée, version tricolore...

Les balcons du Colisée, version tricolore…

Pour l’occasion, j’avais suggéré aux équipes du Colisée de projeter les couleurs bleu blanc rouge sur le rideau du théâtre, c’était techniquement compliqué, mais ils ont fait encore mieux : colorer les balustrades art déco du Colisée. Le rendu est superbe, et c’est dans cette magnifique salle que nous expliquons à un public convaincu d’avance que le maintien des spectacles, même comiques, est notre manière de rendre hommage aux victimes des attentats du 13 novembre, à qui bien sûr nous dédions la représentation…

devant le rideau...

devant le rideau…