Archives mensuelles : mai 2015

« Roubaix style » : merci à Tracks et à Arte !


Un vrai plaisir de voir un bon reportage sur la vie culturelle de Roubaix, merci à ARTE et à Tracks

roubaix style

Certes, on n’échappe pas au discours misérabiliste sur la ville la plus pauvre de France, et le parallèle avec Manchester est certes flatteur, mais on ne sait pas trop s’il fait référence au passé économique de la ville, à la scène musicale mancunienne (t’as vu l’adjectif !) ou aux 2.

Ne gâchons pas notre bonheur, c’est donc un vrai plaisir de voir que notre ville peut aussi faire l’objet d’une couverture médiatique un peu fouillée, on voit que les journalistes ont passé plusieurs jours sur place, et qu’ils ont cherché à aller un peu au delà des clichés qu’ils avaient sans doute en tête en conférence de rédaction 🙂
Et surtout soulagé de voir que Lena Deluxe semble avoir plus séduit les journalistes que Gradur; et les quelques minutes sur son protégé N.I.M – visiblement ils n’ont pas dû obtenir d’interview de l’homme au bob himself – sont assez bien tournées et évitent le piège de l’habituel ego trip du rap game.
Début à 32:50 si The Ruts et Indiana Jones ne vous intéressent pas, et replay jusqu’au 8 juin seulement…

 

On en profite pour vous mettre un peu de Lena Deluxe :

et un peu de N.I.M aussi :

Nuit Des Arts : à Roubaix, la culture est au coin de la rue

Avec la Nuit Des Arts, la ville de Roubaix a su profiter de l’engouement autour de la Nuit Des Musées pour créer une dynamique culturelle populaire de qualité.IMG_20150516_173427

Pour sa 11ème édition, ce sont plus de 30 000 personnes qui ont fréquenté musées, ateliers, commerces et autres lieux partenaires pour (re)découvrir la richesse de la vie artistique roubaisienne.

La Nuit Des Arts, c’est d’abord un des moments les plus appropriés pour valoriser le patrimoine roubaisien sous toutes ses formes. Alors oui, on pense forcément à la Piscine, aux maisons en briques, aux cheminées d’usine mais Roubaix ce n’est pas que ça. Il y a tout un écosystème d’ateliers d’artiste étonnants et complètements inattendus ; des usines revues, détournées, améliorées où l’on trouve une terrasse avec une vue panoramique sur les toits en shed de la ville. Ce sont également des lieux que l’on connaît tous mais que la Nuit Des Arts éclaire d’une lumière toute particulière : la place de la gare, le centre social de l’Hommelet ou encore l’Office de Tourisme.

La Nuit Des Arts, c’est également l’un des moments privilégiés, avec les Journées du Patrimoine, où les habitants de la ville ont l’opportunité de se retrouver en contact avec leurs voisins artistes et d’échanger avec eux. Ces échanges ne sont pas de banales discussions autour de la météo mais, comme au 41 rue Saint-Jean, une vraie participation à un projet artistique expérimental et détonnant. A Roubaix, la vie artistique fait partie intégrante de la vie de quartier.

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Enfin, et on le voit particulièrement avec cette 11ème édition de la Nuit Des Arts, le monde économique et les commerçants locaux s’impliquent volontiers dans ce moment. Cela nous permet d’avoir un échange complètement différent avec eux et de se rendre compte que tous ces lieux ont une âme, comme cette soirée particulière le révèle à tous. De plus, et c’est à souligner, les participants ne sont pas uniquement liés au monde de la culture, on trouve bien sûr des librairies, des lieux d’expositions mais aussi des restaurants, des artisans, un tatoueur et même un centre d’affaires.

 

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Pour reprendre le titre de cet article, la Nuit Des Arts n’est pas un gros évènement artistique construit autour des grandes institutions culturelles de la ville, comme le musée de la Piscine. C’est un moment spécial où les genres se croisent, où des personnes différentes qui se côtoient chaque jour s’associent à l’autre à chaque coin de rue. C’est le moment où Roubaix et les roubaisiens montrent à tous et à toutes à quel point ils sont fiers d’eux-mêmes, de leur ville et de la vie qu’ils y mènent.

Desplechin : une polémique qui se dégonfle…

Desplechin

Le cinéaste en pleine action

Arnaud Desplechin et son nouveau film, « Trois souvenirs de ma jeunesse », font beaucoup parler d’eux.

Du moins, pas vraiment le film en lui-même, qui est plutôt bien voire très bien reçu par la critique et le public, mais plutôt une déclaration du réalisateur dans l’interview parue dans le magazine Society qui crée la polémique. Il y déclare notamment qu’ « à Roubaix, j’ai vécu en état d’apartheid ».

 

Pour en avoir le cœur net, le mieux est encore d’aller voir le film !

Et là, la polémique se dégonfle comme un ballon de baudruche. L’écart est très marqué entre le contenu du film et les déclarations de son réalisateur. Ce si bruyant « apartheid » n’est pas visible dans le film. Tout au plus une scène avec un dealer, relativement brève et relevant plutôt d’une discussion business que sociologique…

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Les jeunes du film, des talents amateurs locaux

Ce film est avant tout une œuvre cinématographique sur l’enfance, la jeunesse, le passage à l’âge adulte et tout ce qui va avec (les études, l’amitié, les relations sentimentales…); bref, l’œuvre même de Desplechin. Et le cadre roubaisien, d’ailleurs plus implicite qu’explicite, correspond là aussi tout à fait aux films précédents du cinéaste, pour qui l’inscription dans un lieu est majeure. N’oublions pas qu’il y a « 3 souvenirs » et que Roubaix n’en est qu’un des 3…

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Échange entre le réalisateur et ses comédiens

Enfin, on peut s’interroger sur cette polémique d’un point de vue plus médiatique et économique. Cette année, le nouveau film d’Arnaud Desplechin n’est pas sélectionné en compétition officielle au Festival de Cannes, mais dans la Quinzaine des Réalisateurs. Or, le réalisateur explique que cela va réduire l’exposition médiatique de son film. La diffusion à l’étranger risque d’en être plus difficile, ce que l’on regrette avec lui. Comme on le sait, on peut faire dire beaucoup de choses à un bout de phrase d’interview pris isolément…

En ce qui concerne le film, vous pouvez allez forger votre propre avis, avec la bande-annonce par exemple :

Petite revue des critiques de la presse :

Libération « C’est justement une question de nom qui donne au film son souffle premier, le démarrage de cette haletante péripétie dans l’intime »

Critikat « À l’éducation intellectuelle que l’on redoutait, est préférée une pure jubilation romanesque, prologue à l’âme du film, du personnage et de la saga : son éducation sentimentale »

La critique vidéo du Monde :

Parce que « La Grand’Plage » sera bien plus qu’une médiathèque à Roubaix…

Nous voulions garder le nom secret jusqu’à la réouverture de l’équipement, malheureusement l’information a fuité aujourd’hui dans la presse, je confirme donc que la médiathèque de Roubaix aura donc, comme dit Nord Eclair « un vrai nom » et s’appellera à partir du mois de septembre « La Grand’ Plage ».

Le futur rez-de-chaussée de La Grand'Plage

Le futur rez-de-chaussée de La Grand’Plage

Pourquoi ce nom a priori surprenant ?

Parce que nous voulions signifier que 35 ans après son ouverture, le lieu allait radicalement changer dans sa disposition (l’implantation sera très largement revue), dans ses usages (introduction du libre emprunt et restitution des documents grâce à la technologie RFID), dans ses horaires d’ouverture…

Parce que nous voulions changer le nom aussi pour bien montrer que la vocation du lieu était bien plus large que celle d’un endroit de prêt de documents : aussi un lieu de programmation culturelle, de rencontre, de convivialité, de découverte, de restauration, de concert, de soutien scolaire, et bien d’autres choses encore. Bref, un équipement culturel à part entière, et quel meilleur moyen de le dire qu’en le dotant d’un nom spécifique ?

Parce que tout cela est l’aboutissement d’une démarche de large consultation menée l’été dernier, que je décrivais en toute transparence dans un post du 5 juillet, « Et si on trouvait ensemble un nouveau nom à la médiathèque de Roubaix » ? Des ateliers ont associé des usagers, des employés de la médiathèque, des acteurs de la culture et du monde du livre de Roubaix, des services municipaux; ils ont réfléchi ensemble aux valeurs de la médiathèque, à ce qu’elle voulait dire et défendre; ils ont brainstormé sur quantités de noms possibles; et qu’au terme de cette démarche de co-construction, c’est ce nom de  » La Grand’Plage » qui a remporté les suffrages du comité de sélection. Je précise que ce comité était constitué de la directrice de la Médiathèque, du directeur de la Culture de la Ville, du directeur de la Communication, et des 2 élus en charge du dossier, Véronique Lenglet et moi-même.

Un changement bientôt à prévoir sur la façade...

Un changement bientôt à prévoir sur la façade…

Parce que « La Grand’Plage » n’a rien à voir avec une médiathèque, et alors ? Clio n’a rien à voir avec une voiture, La rose des vents n’a rien à voir avec une scène nationale de théâtre, Amazon n’a rien à voir avec le commerce en ligne, qui s’en soucie ? C’est même justement l’absence de référence directe à l’univers du livre qui nous a parue pouvoir offrir plus de sens, plus de force, plus de d’imaginaire au nom.

Parce que, effectivement, ce qui nous plaisait dans ce nom, c’était les valeurs et les références qu’on pouvait lui associer : les loisirs, la détente, la famille, le soleil, la liberté, l’espace, la convivialité. Cerise sur le gâteau, on pouvait aussi filer la métaphore de lieux déjà bien connus de la ville : la Piscine (tiens, personne ne s’étonne plus que notre musée s’appelle la Piscine…), le Grand Bassin, le Vestiaire, et bien sûr la proximité physique et phonétique de la Grand’Place, cela permettait d’inscrire la Grand Plage dans un ensemble de noms déjà existants, et de souligner encore l’appartenance de la médiathèque au réseau d’équipements culturels de la ville.

Au final, la Grand’Plage sera donc un lieu de lecture publique et de démocratisation culturelle largement rénové, en phase avec son temps, en harmonie avec les usages et les souhaits des roubaisiens, une référence nationale (la Bibliothèque Numérique de Roubaix fait partie des 10 bibliothèques numériques labellisées par le Ministère de la Culture); il fallait bien un nouveau nom décalé, original et sympathique pour dire tout ça 🙂

Non, la salle de lecture de "La Grand'Plage" ne ressemblera pas à ça, mais l'esprit est là...

Non, la salle de lecture de « La Grand’Plage » ne ressemblera pas à ça, mais l’esprit est là…(photo Ouest France)

« On dit souvent » : les jeunes de Roubaix acteurs de leur avenir !

OnDitSouvent_LogoOui, ce « On dit souvent » va permettre à 7 jeunes roubaisiens d’aller au festival de Cannes pour y présenter la 2ème saison de leur web-série du même titre.

C’est la 2ème année consécutive que cette réalisation du Pôle Ressources Jeunesses Deschepper permet à ses auteurs de participer au festival de cinéma le plus célèbre et important du monde ; la nouvelle saison étant encore entièrement tenue secrète, la curiosité nous titille, que peuvent-ils donc bien nous réserver…? Réponse très bientôt j’espère !

Passant d’une 1ère saison où chaque épisode était distinct des autres, cette nouvelle fournée s’articulera autour d’une histoire, d’un fil conducteur pour l’ensemble de la saison. Le travail des équipes, des partenaires (écoles, entreprises, associations) et des étudiants s’est voulu plus poussé techniquement et scénaristiquement, de manière à être encore meilleur par rapport à l’année précédente. Je ne peux que saluer cette démarche qui professionnalise leur approche et leur travail. Ce dernier n’en sera que plus qualitatif et pourra voir son audience s’élargir.

OnDitSouvent_Equipe

photo Nord Eclair

Cette présentation au festival de Cannes va être une expérience unique pour ces 7 jeunes. En plus des strass, des paillettes et de l’ambiance unique qu’ils vivront lors de ces quelques jours exceptionnels, ils vont surtout pouvoir y nouer des contacts pour leurs futurs professionnels, la plupart ayant des projets personnels articulés autour de la vidéo, du théâtre ou de l’humour. Car, ne l’oublions pas, c’est bien là l’objectif premier de ce projet, permettre aux jeunes de Roubaix d’être acteur de leur avenir…

 

L’équipe d’encadrement du PRJ Deschepper est très fière – et à juste titre!,  de voir son action reconnue lors d’un tel événement, surtout pour une seconde année consécutive. Je suis pour ma part tout autant fier de cette réussite, réussite de Roubaix, de ses jeunes et des personnes qui croient en eux.

 

Cadeau bonus : les liens des épisodes de la saison 1, jugez par vous-mêmes…

 

 

« Richie », dans la fabrique du pouvoir et de l’élite française

richard-descoings-kiosqueC’est presque devenu un genre littéraire à part entière, la « biographie politique par les journalistes du Monde ». Après le « Mauvais génie » d’Arianne Chemin et Vanessa Schneider le mois dernier consacré à Patrick Buisson, c’est au tour de Richie, alias Richard Descoings, sous la plume de Raphaëlle Bacqué. Et c’est, dans l’ensemble une vraie réussite.

Le premier chapitre est une accroche parfaite. La séquence d’ouverture d’un biopic qu’on aimerait voir se faire. Frappant, visuel, émouvant, inattendu, historique. La plume légère, bien trempée. On plonge la tête la première.

Le voyage est, avouons-le, souvent passionnant; et on découvre un Richard Descoings qu’on était bien loin de soupçonner. Son passage à Aides, son élection à la tête de Sciences Po à moins de 40 ans, son drôle de ménage avec Guillaume Pépy, sa gestion speed et borderline de la vénérable institution, la quasi rock star qu’il était devenu, le personnage a de nombreuses facettes que Raphaëlle Bacqué décrit avec brio.

l'auteure, Raphaëlle Bacqué

l’auteure, Raphaëlle Bacqué

C’est aussi la face cachée du fonctionnement en réseau d’une certaine élite française qu’on y découvre, bien sûr dans les parcours croisés des cabinets ministériels et des grands corps de l’Etat; mais aussi les innombrables retours d’ascenseur de l’enseignement supérieur, du monde des médias, la tambouille assez indigeste qui fonctionnait si bien dans la gestion de Sciences Po. Et un certain fonctionnement de « la fabrique du pouvoir » qui s’illustre de manière très parlante sous nos yeux.

Les chapitres sur la naissance des programmes d’intégration directe en première année des élèves issus des lycées de banlieue sont à ce titre édifiant, et prendront une saveur toute particulière pour le lecteur roubaisien, en particulier ceux qui en connaissent les lycées, leurs élèves et leur entrée dans l’enseignement supérieur. L’on y voit un directeur qui rend visite à des proviseurs dans sa voiture de fonction un peu comme dans un safari; des proviseurs ébahis qu’on s’intéresse à eux et à leurs élèves; des chargés de mission passionnés jusqu’à la moëlle; un amphi mémorable où « Richie » arrive à convaincre ses étudiants du bien fondé du programme; et les innombrables jeux de couloir nécessaire pour arriver à faire passer la loi en question. Du bel ouvrage à vrai dire.

Le livre est à vrai dire un peu moins convaincant sur les aspects psychologiques des différents personnages et de Descoings en particulier; qu’on a souvent bien du mal à saisir. Est-il bipolaire ? Suicidaire ? Sous speed et calmants ? Quelle relation l’unit avec Guillaume Pépy et comment évolue-t-elle ? Comment comprendre, au delà de la façade qui ne convainc personne, son mariage et son tandem avec Nadia Marik ? Quel est ce charisme qui lui permettait de convaincre tant de recrues brillantes de le rejoindre à Sciences Po, et qui restait malgré l’enfer professionnel qu’ils y vivaient parfois ? Sur tous ces sujets, Bacqué n’emporte pas l’adhésion. Il y aurait sans doute fallu la plume d’un romancier plus psychologique, sans doute de haut vol vu le personnage, pour nous permettre d’approcher un peu plus la psyché torturé de « Richie », ou du moins de s’en approcher. A défaut, on a quand même souvent l’impression d’avoir affaire à un directeur psychologiquement instable et hystérique, sans trop comprendre pourquoi.

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Néanmoins, ne boudons pas notre plaisir, ce « Richie » est addictif et s’avale d’une traite. On peut se demander si tout cela en fait un modèle de « disruption » et de gestion d’un établissement d’enseignement supérieur. Au vu de l’héritage et de l’oeuvre accomplie, sans doute, oui.