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Petite cour…Grande impression?

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J’avais noté dans mes papiers « un nouveau resto à tester absolument ». Les journaux, les blogs, les conseils des amis, tout le monde se fait ambassadeur du guide Michelin quand ils parlent de lui. On le soigne aux petits oignons. C’est le nouvel endroit branchouille à Roubaix. C’est Ze place to be ! Même Jérôme Dumont, toujours à l’affût d’endroits sympas, ne tarit pas d’éloges sur son blog « Grand place Roubaix« . Et ce n’est pas le genre de personne à qui on raconte des salades !

Hier, l’occasion était parfaite. Je cherchais un resto sympa pour le midi qui changerait du Bel étage, Envies de saison ou autres lieux du genre. C’était son anniversaire. Et bien entendu, j’ai pensé à la Petite cour. Ni une, ni deux, j’ai réservé une table (et 2 chaises !)…

12 h 30, me voilà enfin dans cet établissement dont tout le monde parle. J’observe autour de moi. L’accueil est chaleureux. Promesse d’un moment agréable. La carte est simple et courte comme j’aime. Promesse de renouvellement fréquent selon la saisonnalité donc de fraîcheur. La décoration est sobre dans le style ancien revisité. Promesse d’un lieu assez huppé. Je regarde la clientèle. Je confirme, ça l’est. Promesse d’une ardoise élevée.

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Ils ont mis les petits plats dans les grands. Le vulgaire hamburger/frites de Fred était devenu un plat gastronomique. On ne culpabilise plus pour le manger. Ma salade César était à sauter au plafond, ma tarte au chocolat était à se rouler par terre, et mon nutritionniste en serait malade !

La cuisine est bonne. La présentation est soignée. Ce n’est pas comme ces fameuses soirées branchées à la Teinturerie chez Vynckier où toute la bourgeoisie de la métropole lilloise se retrouve pour manger des plats réchauffés. Mais c’est Ze place to be seen, me direz-vous. Et que ne ferait-on pas pour être seen ? Bon j’avoue, j’y suis allé il y a des années de cela et je n’y ai jamais remis les pieds. C’est peut-être mieux aujourd’hui. Dites-le moi !

Mais revenons à nos moutons, revenons à la Petite cour. Ce restaurant a bien tenu toutes ses promesses :

  • Promesse d’un moment agréable. Vrai !
  • Promesse de fraîcheur. Encore vrai !
  • Promesse d’un lieu huppé. Complètement vrai!
  • Promesse d’une ardoise élevée. Carrément vrai!

En effet, l’addition était un peu salée pour un midi. Je ne le ferai pas tous les jours. Mais bon, aujourd’hui est un jour spécial et parce que Fred le vaut bien. Yes, you’re worth it !

Tous les ingrédients étaient au rendez-vous pour garantir la réussite d’un bon moment. Et pourtant, je n’ai pas été plus emballé que cela. Je ne voudrais pas casser du sucre sur son dos, ni en faire tout un fromage mais la sauce n’a tout simplement pas pris pour moi. Il manquait un petit je ne sais pas quoi pour faire fondre mon cœur.

Je voulais y aller. J’y suis allé. Et je n’irai probablement plus sauf si on m’invite !

Dehors, en me dirigeant vers ma voiture, une devanture m’interpelle et m’intrigue. Je m’approche, c’est une boulangerie, La Mie Sésame. La vitrine est originale, simple et sans prétention; C’est le coup de foudre. J’entre pour découvrir l’intérieur. Je discute avec le propriétaire; Je suis sous le charme. Cette boulangerie est magique. Elle a ce petit je ne sais quoi qui fait défaut à La petite cour : une âme, une personnalité. Et dire que je passe devant chaque jour en voiture sans même la remarquer.

Promis, juré, craché, je la teste bientôt et je vous en parle ! Je vous dis quoi…

ThanhNguyen

Ça balance pas mal à Roubaix (1) : le Marché des Modes

Pour ceux qui en doutaient encore, Roubaix est ce week-end THE place to be dans la métropole lilloise (et au-delà…); avec une concentration d’événements qui à juste titre attirent une foule de curieux, d’amateurs ou de flâneurs.

On commence par le Marché des Modes, qui est l’occasion de rappeler que Roubaix est un des 2 lieux d’implantation des « Maisons de Mode » (avec Lille Sud), programme qui aide au démarrage à l’installation de jeunes créateurs. Bien entendu, leurs boutiques, situés le long du boulevard Jean-Baptiste Lebas, sont ouvertes pour ce Marché, mais aussi le « Vestiaire », sorte de mini grand magasin des créateurs, et le hall de l’ENSAIT, qui accueille un vaste marché de stand de boutiques tout aussi sympathiques.

Soyons clair, on n’est pas dans le discount et pas toujours dans le grand public, mais ceux qui cherchent des pièces originales, artisanales, en petites séries, ou des bijoux originaux, des accessoires de cuir, etc, y trouveront forcément leur bonheur. Un exemple ci-après

Redoute : and the winner is…Nathalie Balla !

Nathalie BallaC’était un peu cousu de fil blanc…Hier, la veille de l’annonce officielle du repreneur choisi par Kering pour La Redoute, Nathalie Balla annonçait, au mépris de l’embargo traditionnellement de mise dans ce genre de dossier, et à la surprise générale qu’elle avait déposé un dossier de candidature à la reprise.
Quand on sait la quantité de travail en amont que nécessite ce genre de dossier, il était clair que cette annonce était tout sauf improvisée, et on se doutait bien que cette annonce ne pouvait qu’avoir été validée par Kering; et surprise! Kering a annoncé aujourd’hui entrer en négociation exclusive avec Nathalie Balla pour la vente de La Redoute.
Le caractère rassurant pour les salariés et l’environnement politico économique du Nord a dû être déterminant dans le choix du repreneur. Et il faut reconnaître que la connaissance fine des rouages d’un monstre comme Redoute, de ses forces et de ses faiblesses, pourra être un atout dans la vitesse d’exécution et la justesse des mesures à prendre.

photo FranceTvinfo

photo FranceTvinfo

Reste à finaliser le plus important : quel projet de retournement, à mener par celle qui est déjà aux commandes depuis 4 ans. On aura rapidement beau jeu de lui demander pourquoi elle n’a pas appliqué plus tôt ce qu’elle prônera bientôt. Reste aussi à déterminer quelle implication financière de Kering dans la cession; on parle d’une fiducie de 500 à 600 M€; si celà était vraiment le cas il s’agirait d’une bonne nouvelle, car cela permettrait réellement une modernisation de l’informatique, de la logistique, et le financement de quelques années d’exploitation.
Bien évidemment, celà n’exclut pas – voire confirme – que des licenciements auront bien lieu, mais au moins peut-on espérer qu’ils seront faits en meilleure connaissance de cause et en tenant plus compte de l’historique que ne l’aurait fait un repreneur totalement externe au dossier.
On suivra dans les mois qui viennent avec attention ce sujet.

post initialement publié ce jour sur mon blog « Le Commerce dans tous ses états »

 

Roubaix : où sont les drives ?

lp drive

Les drives, c’est de loin le segment le plus dynamique de la distribution de ces dernières années. A cela de très bonnes raisons : une législation beaucoup plus souple et en cours de rigidification, ce qui accélère le mouvement; la maturité des techniques web qui en sont le corollaire indispensable, la saturation ou le ras-le-bol des clients vis à vis des hypers gigantesques, et la possibilité d’ouvrir d’aller chercher quelques points de marché à la barbe de ses concurrents en s’installant au rond point d’à côté.

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Quelques ordres de grandeur, pour bien montrer qu’il ne s’agit pas d’un épiphénomène bobo ou limité aux zones de chalandises CSP+, mais bien d’un mouvement de fond à l’échelle nationale : au 1er septembre 2013, Drive Insights recensait 2159 implantations, dont 66 sur les seuls mois de juillet et août (détails sur http://www.olivierdauvers.fr/2013/09/06/drive-qui-a-ete-le-plus-actif-cet-ete/).

drive - ouverture

Dans les dernières tendances, le drive élargit son univers marchand, et ne se cantonne plus aux supermarchés et hypermarchés alimentaires. On connaît ainsi sur la métropole lilloise un Biodrive, un GelDrive, et il existe des hard discounts drive (Leader Price), et la distribution spécialisée est en train de s’y mettre (d’ailleurs, les cours matériaux des GSB n’étaient-elles pas des drives avant la lettre…).

Et Roubaix dans tout ça ? Berceau de la distribution française moderne, depuis longtemps habituée aux formes de commerce contemporaines, on aurait pu s’attendre à y voir bourgeonner les drives … Or c’est tout le contraire qui se produit : il n’y a toujours pas un seul drive pour une ville de près de 100000 habitants; alors qu’ils pullulent dans les villes alentour!

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Faisons le compte : ni le Géant de centre ville, ni les supermarchés (Intermarché) de la ville ne sont passés au drive. En revanche, au voisinage, c’est l’explosion : Auchan Drive à Leers bien sûr; Chronodrive à Croix et Wasquehal, Leclerc à Hem, et même Wattrelos qui annonce, tout près de la frontière roubaisienne (au rond-point du Sartel, au sein d’un éco-village), l’ouverture d’une enseigne encore mystérieuse !

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La situation est d’autant plus étonnante que le commerce roubaisien n’est pas en forme olympique : 2 supermarchés Match ont fermé, et l’un est resté une friche commerciale pendant des années avant que l’enseigne hallal Le Triangle ne le remplace cet été. Le Géant Casino vivote (pour rester poli), les hard discounters semblent tenir le haut du pavé. Implanter une nouvelle forme de vente n’aurait sans doute pas été absurde.

drive itm

Il ne s’agit pas non plus d’un problème foncier d’emplacements disponibles : un rapide examen des implantations possibles permet d’en identifier facilement plusieurs, sans être un spécialiste de l’immobilier commercial : station service Oil du bld Gustave Delory, friche Devianne du centre-ville (derrière la Banque de France et Midas), boulevard Gambetta à proximité du KFC, imprimerie du bld Jean Jaurès, abords du rond point de l’Epeule, zone commerciale de la Cense toujours sur Delory… Avec axes de communication fréquentés, et zones de chalandise aisée; qu’on ne me dise pas qu’il n’y a pas de drive à Roubaix parce que Roubaix est pauvre, on ne parle pas d’en implanter aux 3 Ponts.

Il faut sans doute en conclure que les 2 raisons principales en sont :

. le manque d’action de la mairie sur l’identification de cette piste de développement économique, de repérage des emplacements, d’échanges avec les enseignes concernées (dont certaines ont leur siège à quelques centaines de mètres de la ville!), ainsi que de mise en avant des atouts de la ville.

. les effets de l’image de marque déplorable de la ville, dans les domaines commerciaux, fruits là aussi d’une longue histoire économique pas toujours reluisante (Roubaix 2000 et la descente aux enfers du commerce de centre-ville en témoignent), qui donnent sans doute des sueurs froides aux enseignes pas encore implantées sur Roubaix pour y venir ou pour y développer leurs activités, et qui préfèrent miser sur une périphérie qui paraît plus favorable.

A 6 mois des élections municipales, voilà un exemple concret de dossier sur lesquels on aimerait voir des prises de conscience, voire (soyons fous!) des propositions concrètes des futures listes. A bon entendeur…

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mise à jour du 26 janvier 2015

Cet article est visiblement ressorti du fond des internets et émeut quelques clients de « La Ruche Qui Dit Oui », drive de produits fermiers sur l’avenue Jean Jaurès le jeudi après midi. Quelques remarques à ce sujet :

. La Ruche n’était pas encore lancée en septembre 2013 lors de l’écriture de ce billet. C’est effectivement une proposition commerciale attractive et qui a l’air de remporter un réel succès – ce qui a fortiori renforce l’objet même de cet article…

. cependant j’ai quelques difficultés à l’associer à la notion classique de drive. On est plus pour moi sur un point d’emporté temporaire, puisque le créneau n’est que de 3 h par semaine, et qu’il n’y a pas de stocks sur place. Le service associé est donc nettement différent d’un drive ouvert 70 h par semaine. C’est néanmoins un premier pas très encourageant…

. on se reportera aussi à mon article sur l’ouverture de O’Tera à St André, sur un sujet connexe et où je cite La Ruche…

Roubaix, Detroit, destins croisés

ou : Pourquoi Roubaix n’est pas devenue la Detroit française…

Une ville ancienne, qui a dominé le monde par son industrie, mais qui a durement souffert du déclin de celle-ci, qui a connu une importante paupérisation et une augmentation sensible de la délinquance…Ca ne vous rappelle rien ? Non, ça pourrait ne pas être de Detroit dont je parle, mais de Roubaix.

 

Comme Detroit avec l’automobile, Roubaix a été (une des) capitales mondiales de l’industrie textile au début du 20 ème siècle, qu’on appelait “la ville aux 1000 cheminées”,  et qui en porte les traces prestigieuses à travers de nombreux bâtiments de la ville.

Comme Detroit, Roubaix a durement souffert du déclin rapide de cette industrie florissante, et les friches industrielles sont aujourd’hui légion.

Comme Detroit, la reconversion n’a pas été simple et aucune nouvelle activité miraculeuse n’est venue la sauver. Comme Detroit, le chômage y est beaucoup plus important que dans le reste du pays ou dans les autres villes (19.5 % de la population active à Roubaix; 16.3 % à Detroit après un pic à 27% en 2009).

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Comme Detroit, les habitants riches l’ont quitté petit à petit et c’est dans le coeur même de la ville que s’est installée une population beaucoup plus pauvre; à tel point que Roubaix est une des rares villes en France où la zone franche inclut le centre-ville (au moins partiellement). A Detroit, la population est passée de 1 800 000 en 1950 à 685 000 aujourd’hui soit une baisse de de 63%. A Roubaix, la population a culminé à 125 000 habitants au début du 20ème siècle pour péniblement atteindre les 94700 en 2010, soit une chute de 25%, alors que la population française est passée de 40 à 65 M sur la même période (+60%).

 

La concentration d’une population pauvre a pour conséquence aussi la baisse des recettes de la ville, qui ne peut plus se procurer les ressources nécessaires à son développement, et doit financer de coûteuses politiques sociales.

De plus, comme Detroit, l’insécurité, la délinquance, les trafics en tout genre ont prospéré sur ce terreau fertile, et si l’expression “zone de non droit” est parfois galvaudée, il faut reconnaître que certains quartiers de la ville sont particulièrement concernés par les trafics et incivilités en tout genre.

Enfin, comme Detroit, Roubaix traîne depuis plusieurs années une réputation détestable. Celle de Detroit était plutôt de capitale du crime; celle de Roubaix est malheureuse “la ville la plus pauvre de France”.

Mais pour autant, la nouvelle de la faillite de Detroit, si elle est assez frappante pour une ville de cette taille, nous fait prendre conscience que, face à une situation relativement comparable, Roubaix a su prendre un chemin différent et beaucoup plus positif.

Tout d’abord, reconnaissons-le, la France a mis en place des filets protecteurs pour ses territoires les plus fragiles, et Roubaix en a abondamment – et à juste titre – profité. En 2012, sur un total de recettes de 147 M€, Roubaix bénéficie d’une dotation de solidarité s’est montée en 2012 à 27 M€, expression sonnante et trébuchante du soutien de la nation. Pour donner un ordre de grandeur, cela représente à peine moins que la rémunération principale des personnels municipaux (30 M€), hors charges sociales. Sans cette dotation, Roubaix devrait se séparer de la moitié de ses personnels. On mesure bien les impacts que cela aurait sur le fonctionnement de la ville et la vie quotidienne des habitants.

Les élites roubaisiennes, il faut l’avouer, n’ont pas toujours su comment affronter un déclin annoncé, puis imminent, puis trop présent; disons qu’entre les années 70 et les années 90, Roubaix s’est enfoncée dans le marasme puis la crise puis la paupérisation.

Heureusement, un sursaut a eu lieu, mené par des hommes d’exception certes (je pense bien sûr à André Diligent), mais aussi par une prise de conscience globale qu’il fallait agir, et tenter autre chose que les recettes qui échouaient jusqu’alors. Le triptyque qui s’est alors dessiné, quelque chose comme une politique de soutien social massif, une action urbaine volontariste, un fer de lance de renouveau culturel, reste encore aujourd’hui la base des politiques municipales qui se sont succédées.

Cependant, si heureusement le filet national et les élites locales ont permis à Roubaix de s’en sortir, il faut bien reconnaître que cette situation est précaire, et que depuis 10 ans le progrès est beaucoup moins tangible. On pourrait même dire que les signes d’une dégradation profonde de la situation de la ville s’accumulent : les fermetures d’entreprises et les plans sociaux se succèdent, la désertification commerciale s’amplifie et les friches refleurissent, la “pompe à pauvreté” du logement très social et de l’habitat indigne ne s’est pas enrayée, l’insécurité reste une préoccupation majeure et l’on peut même craindre que les comportements délinquants ne se radicalisent.

Certes, la faillite n’est pas encore aux portes de la ville, il serait faux de faire croire que la gestion actuelle en fait sérieusement courir le risque. Mais ce qui peut être plus inquiétant, c’est plutôt l’absence d’un projet porteur qui soit vraiment enthousiasmant; et les incantations actuelles sur le “vivre ensemble” n’en sont pas un.

Après tout, c’est aussi à cela qui doivent servir les municipales…

Quelques liens :

Sur la faillite de Detroit : http://www.lesechos.fr/economie-politique/monde/actu/0202907075614-detroit-les-sept-raisons-de-la-faillite-587906.php

http://www.courrierinternational.com/article/2013/07/19/detroit-apres-la-faillite-les-questions

Le “fameux” classement des villes les plus pauvres : http://www.journaldunet.com/economie/magazine/les-villes-les-plus-pauvres/roubaix

et Le Monde nous rappelle pourquoi une ville française ne peut (quasiment) pas faire faillite… : http://www.lemonde.fr/politique/article/2013/07/19/une-ville-peut-elle-faire-faillite-en-france_3450341_823448.html